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La cigarette aide à déstresser ! Non c'est faux !

" Quand je suis stressée, je fume une petite cigarette et çà me détend… C'est pour cela que je veux pas arrêter de fumer… J'aurais peur d'être trop anxieuse…".

Cette patiente que je reçois pour un problème de comportement alimentaire croit avoir raison et semble avoir un raisonnement logique…

Et pourtant !

La crainte de ne plus pouvoir contrôler le stress s'avère, dans mes consultations, un des arguments les plus fréquemment cités par les fumeurs pour retarder ou avoir différé leur décision de dire stop au tabac.

Bon nombre de fumeurs de même affirment que le tabac les apaise et leur permet de réduire leur stress?



Le tabac ne réduit pas le stress

Bon nombre de fumeurs affirment que le tabac les apaise et qu'il permet de réduire leur stress ou leur anxiété.

En fait, c'est tout le contraire.

Le tabac est en fait un faux anti stress qui, au contraire, rend plus anxieux ! Mais pourquoi ? Qu'en est-il en réalité ?

Pour certains, cette erreur viendrait d'une confusion – s'ils se sont engagés dans un processus d'arrêt du tabac – entre les signes de stress et les symptômes du sevrage. Oui du sevrage… Même chez le fumeurs qui fument !

Chez d'autres, le sentiment serait dû à une méconnaissance ou une ignorance du processus que la nicotine engendre, en particulier quand se produit l'effet de manque.


Comment cela est-il possible ?

Comment la cigarette rend-elle "accro" ? Quels sont les mécanismes en jeu dans ce couple singulier stress - tabac ?

Les fumeurs évoquent de nombreux obstacles pour expliquer leur difficulté à arrêter de fumer : manque de motivation, habitude sociale, peur de grossir… Mais l'un des facteurs les plus fréquents est la peur de ne pas pouvoir gérer leur stress et de ne plus pouvoir le contrôler.


Mais fumer réduit-il le stress ?

Une étude parue en 2003 concluait que la relation tabac - stress - affects négatifs était extrêmement complexe, du fait notamment des effets contra-dictoires de la nicotine chez des fumeurs réguliers.

Une autre étude portant sur plus de dix mille personnes âgées de 50 à 64 ans et réalisée par deux chercheurs de l'Université de Yale, montra que le stress tendait à accroître le nombre de cigarettes fumées et augmentait parallèlement la difficulté d'un sevrage.

On sait aujourd'hui donc que les risques de troubles anxieux sont augmentés chez les fumeurs . L'anxiété mais aussi la dépression ! Le risque d'anxiété généralisée est multiplié par 5,5 – soit une augmentation de 550 % chez les fumeurs – et le risque de troubles de panique par 15 – soit une augmentation de 1500 % par rapport à la population des non fumeurs !…

La conclusion est aisée : c'est la cigarette qui rend anxieux et stressé !

On observe ainsi, qu'à dose élevée, chez les gros fumeurs qui fument au moins un paquet de cigarettes par jour, la nicotine augmente le risque de dépression. En cas d'arrêt du tabac, la dépression diminue rapidement.

De même, le risque de suicide est plus élevé chez les fumeurs, où il existe deux fois plus de tentatives de suicide chez les fumeuses de moins de 25 cigarettes par jour et 4 fois plus pour les fumeuses de plus de 25 cigarettes par jour.

En cas d'arrêt du tabac, le score de dépression diminue en 3 semaines pour redevenir équivalent à la moyenne générale en trois mois .


Quelques rappels : stress, anxiété et coping

Hans SELYE a défini le stress comme une réponse non spécifique de l'organisme face à une menace.

Face à un stress, l'être humain va utiliser diverses actions psychiques et physiques organisées en mécanismes de défense et activités de "coping", stratégie d'ajustement ou d'adaptation.

Selon la littérature, il s'agit de mécanismes de défense, qui sont des processus automatiques de protection contre l'anxiété, la perception de dangers ou les facteurs de stress internes ou externes. En général, l'individu n'est pas conscient de ces processus au moment où ils sont à l'œuvre.

Le coping, l'adaptation quant à elle, va comprendre "l'ensemble des processus qu'un sujet interpose entre lui et l'événement menaçant, pour maîtriser, tolérer ou diminuer l'impact de celui-ci sur son bien-être physique ou psychologique " .

Cette "attitude" remplit de fait deux fonctions essentielles : la régulation des émotions ou de la détresse (centrage sur les émotions) et la résolution ou la modification du problème qui est la source du stress (centrage sur le problème), qui se manifestera par une recherche active de solutions, d'information, de stratégies alternatives, etc.

L’anxiété par contre est une émotion souvent ressentie comme désagréable, qui correspond à l’attente dans une vision négative plus ou moins consciente d’un danger ou d’un problème à venir. L'anxiété est un phénomène normal, présent chez tous les individus. Elle peut prendre un caractère excessif et pathologique dans différentes situations : on parlera alors de troubles anxieux.

Les sujets souffrant de troubles anxieux sont envahis par ce sentiment d'inconfort ou de peur secondaire à une anticipation excessive d'éventuelles difficultés avant même que les problèmes ne soient survenus, ou avant même que le sujet ait repéré précisément ce qu’il redoute. Les psychiatres parlent parfois de « peur sans objet ».

Dans le cas du tabac, nous en resterons pour notre part aux termes stress et coping.


Les mécanismes mis en œuvre

En allumant une cigarette, les fumeurs se provoquent une légère augmentation de leur tension artérielle, un rétrécissement de leurs artères et une accélération de leur fréquence cardiaque.

Conclusion ? Nous sommes à l'opposé d'un état paisible. Ce qui peut se résumer par le slogan : arrêt du manque ; pas de stress.

Dans ce processus, il est une substance qui va intervenir : la dopamine, un neuromédiateur. Apparue très tôt au cours de l’évolution, elle participe à de nombreuses fonctions essentielles à la survie de l’organisme comme la motricité, l’attention, la motivation, l’apprentissage et la mémorisation. Mais surtout, la dopamine est un élément clé dans le repérage de récompenses naturelles pour l’organisme. Ces stimuli naturels comme l’eau ou la nourriture provoquent des comportements d’approche d’un individu. La dopamine participe aussi à la mémorisation (inconsciente) des indices associés à ces récompenses.

Il est désormais établi que tous les produits qui déclenchent la dépendance chez l'homme (sauf les benzodiazépines) en augmentent la libération dans une zone précise du cerveau, le noyau accumbens.


Mais toutes les drogues ne provoquent pas de la même façon l’élévation du taux de dopamine dans le cerveau :

  • certaines substances imitent les neuromédiateurs naturels et donc se substituent à eux dans les récepteurs ; la morphine, par exemple, s'installe dans les récepteurs à endorphine (une "morphine" naturelle produite par le cerveau), et la nicotine, dans les récepteurs à acétylcholine ;
  • certaines substances augmentent la sécrétion d'un neuromédiateur naturel ; la cocaïne, par exemple, augmente surtout la présence de dopamine dans les synapses, et l'ecstasy surtout celle de la sérotonine ;
  • certaines substances bloquent un neuromédiateur naturel ; par exemple, l'alcool bloque les récepteurs nommés NMDA.


La nicotine du tabac

La nicotine imite l'action d'un neurotransmetteur naturel, l'acétylcholine, et se fixe sur un type particulier de ses récepteurs appelé justement récepteur nicotinique.

Que ce soit l’acétylcholine ou la nicotine qui se fixe sur ce récepteur, celui-ci se comporte de la même façon : il change d’abord de conformation, ce qui ouvre le canal ionique qui lui est associé pendant quelques millisecondes ; celui-ci laisse entrer des ions sodium qui vont dépolariser la membrane et exciter le neurone. Puis, le canal se referme et le récepteur nicotinique devient transitoirement réfractaire à tout neurotransmetteur. C’est cet état de désensibilisation qui va être artificiellement allongé par l’exposition continue à la nicotine.

La dépendance au tabac, qui se développe très rapidement par la suite, vient du fait que les récepteurs nicotiniques sont présents sur les neurones de l’aire tegmentale ventrale qui projettent leurs terminaisons dans le noyau accumbens. Le fumeur chronique maintient, entre chaque cigarette, une concentration de nicotine suffisante pour désactiver les récepteurs et pour ralentir leur renouvellement. D’où la tolérance et la réduction du plaisir ressenti.

Après une brève période d’abstinence (une nuit de sommeil par exemple) la concentration basale de nicotine redescend et permet à une partie des récepteurs de retrouver leur sensibilité. Le retour de tous ces récepteurs à un état fonctionnel hausse la neurotransmission cholinergique à un niveau anormal affectant l’ensemble des voies cholinergiques du cerveau. Le fumeur éprouve alors de l’agitation et de l’inconfort qui le conduit à fumer une nouvelle cigarette.

Une autre substance encore mal identifiée de la fumée du tabac inhibe la monoamine oxydase B (MAO B), une enzyme chargée de dégrader la dopamine recapturée. D’où une concentration plus élevée de dopamine dans le circuit de la récompense qui contribue aussi à la dépendance du fumeur.


Comment agit la nicotine ?

Comme nous venons de le voir, la nicotine agit directement sur le cerveau au niveau d'une région liée au plaisir, le noyau accumbens.

La nicotine que l'on respire va très vite au cerveau : 7 secondes des lèvres au cerveau.

Ainsi, un fumeur de 20 cigarettes par jour, prenant 15 bouffées par cigarettes, s'envoie 300 shoots de nicotine par jour.

Une telle avalanche de shoots modifie le cerveau.

Sous les shoots répétés de nicotine, les récepteurs à la nicotine vont se multiplier, mais dans le même temps devenir de moins en moins sensibles : c'est la fuite en avant pour avoir toujours plus de nicotine durant les premières années de tabagisme.

Après quelques années, la quantité de nicotine nécessaire à satisfaire les récepteurs va se stabiliser et le fumeur va trouver sa consommation de croisière, qu'il gardera le plus souvent toute sa vie. Même s'il arrête de fumer durant plusieurs années, le fumeur retrouvera son niveau de besoin de nicotine, s'il rechute.

La nicotine, comme toutes les autres drogues qui impliquent une dépendance, augmente la libération de dopamine. Les cellules du cerveau communiquent entre elles grâce à des neurotransmetteurs, la dopamine en est un.

Elle agit sur les circuits de la récompense, ou circuit du plaisir, ensemble de structures dans le cerveau qui indique l’état physique et psychique dans lequel le corps se trouve. Une augmentation de la quantité de dopamine dans ces structures entraîne une sensation de plaisir et de bien-être, même si la personne souffre d’une douleur physique ou morale.


Où ?

Les régions du cerveau concernées par le circuit du plaisir sont les plus affectées par les drogues. Le noyau accumbens joue un rôle très important dans les circuits du plaisir. Son fonctionnement repose principalement sur la dopamine.

Mais le noyau accumbens ne vit pas en autarcie, c’est-à-dire séparé du reste du cerveau. Son action est liée à d’autres centres du cerveau : le locus coerulus, centre d’alarme du cerveau, est stimulé par les circuits du plaisir. En période de manque, c’est celui qui pousse à la recherche d’une nouvelle dose.

L'amygdale change la perception de différents éléments après la prise de drogue. C’est ce qui donne au fumeur l’impression que "tout va bien".

L'hippocampe est la partie qui s’occupe de la mémoire. Elle va permettre la conservation de souvenirs agréables de la période de prise de drogue. Une fois que le toxicomane aura arrêté, ces souvenirs sont ce qui risque éventuellement de le faire "rechuter" en éveillant l’envie de recommencer. Ce risque reste à vie.

Le principe de la nicotine va être de stimuler le récepteur artificiellement, sans le message donc du neurone acétylcholine.

Ainsi la nicotine agit sur la majorité des parties du cerveau appartenant au circuit du plaisir, et donc responsables de la dépendance.

Après une brève période d’abstinence (une nuit de sommeil par exemple) la concentration de nicotine dans la fente synaptique redescend et permet à une partie des récepteurs de retrouver leur sensibilité à l’acétylcholine. Pour les fumeurs de longues dates, le retour de tous ces récepteurs à un état fonctionnel devient anormal pour le cerveau et les neurotransmetteurs (la dopamine), le fumeur éprouve alors de l’agitation et de l’inconfort qui le conduit à fumer une nouvelle cigarette et à penser être moins stressé quand il s'adonne à son addiction, dans laquelle certains ne voient qu'une habitude…

Citons également une importante étude américaine qui a permis de mettre en évidence une augmentation de la mortalité cardiovasculaire de respectivement 18% pour l’homme et 31% pour la femme qui fume 10 cigarettes par jour, par rapport à des sujets non-fumeurs.

De plus, le tabac a été mis en évidence comme pouvant potentialiser l’effet néfaste sur le cœur et les vaisseaux des autres facteurs de risque cardiovasculaires.

Nous savons également que le taux de mortalité cardiovasculaire est d’autant plus important que la consommation de tabac est élevée.

Quelques études ont été réalisées pour évaluer l’effet du tabagisme passif sur la mortalité cardiovasculaire : il apparaît que cette mortalité est plus élevée chez les personnes exposées au tabagisme passif par rapport à celles qui ne le sont pas.


LES MECANISMES MIS EN JEU

Nous pouvons en matière cardiaque et vasculaire, énumérer les "dommages" suivants :

- Modification des lipides dans le sang

La consommation de tabac est responsable d’une modification de la qualité des lipides dans le sang, puisqu’il a été constaté une diminution du "bon cholestérol" (HDL-Cholestérol) ce qui augmente proportionnellement le taux de "mauvais cholestérol" (LDL-Cholestérol).

- Modification du flux de sang dans les artères du cœur (artères coronaires)

En effet, il a été démontré que le tabac est responsable d’une augmentation de la capacité de contraction des artères du cœur, pouvant entraîner une diminution du débit de sang.

De plus, le tabac est responsable de modifications fonctionnelles au niveau de la couche de cellules au contact direct du sang (l’endothélium), ce qui le rend responsable de la formation possible d’un caillot de sang et de plaques d’athérome dans une ou plusieurs artères du cœur, ou l'artérite avec de réels risques mortels dans le cas où l'on continue de fumer.


Sortir du piège…

Dès lors la vraie interrogation ne serait-elle pas plutôt celle-ci :

Comment, pour ne pas fumer en période de stress, repérer la source de celui-ci et chercher à l'éliminer…

Si vous savez déjà que c'est le tabac qui augmente votre stress, vous le voyez plus de la même manière… Dès lors que faire ?

1. Pourquoi fumez-vous en période de stress.
Par exemple, est-ce en période d'examen ou d'entretien, pour se donner une excuse, pour faire une pause ?
Pourquoi ne pas vous offrir un autre type de pause, comme prendre un thé vert, sortir faire le tout du pâté de maison pour prendre l'air, arroser vos plantes, lire des histoires drôles,…
Si vous êtes stressé lorsque votre patron vous met la pression, peut-être pouvez-vous en parler à vos collègues, poser plus de questions, ou même lui expliquer que la manière dont il vous parle est contre productive…

2. Fumer est un acte destructeur.
Il semblerait que le seul "avantage" du tabac serait de permettre de canaliser son agressivité. Alors, si tel est le cas, pourquoi ne pas plutôt détruire un trombone, malaxer une boule de mousse, mâcher puis cracher un chewing-gum… Bref, détruire quelque chose d'autre qu'une cigarette… et sa santé...

3. Fumer, parfois, est une moyen de lutter contre la solitude.
Alors que faire ? Téléphoner à un ami au lieu de prendre une cigarette ; vous sentirez moins seul et ce sera plus "sain".

4. Fumer, c'est se calmer ?
Ecouter plutôt une musique douce, faire du sport ou une séance de relaxation ou d'auto-hypnose, même de 2 ou 3 minutes…


Bref, vous voulez être moins anxieux ou anxieuse, moins stressé(e)…
Alors arrêtez de fumer et, au besoin, faites vous aider.


TEST : Etes vous dépendant de la cigarette ?

Un test pour mesurer votre dépendance et votre motivation à devenir non fumeur…
Le test de Fagerström permet de connaître votre dépendance à la cigarette.
Répondez à ces six questions, en mentionnant la réponse qui vous correspond le plus. Adressez-nous vos réponses à contact@sos-psys.fr
Nous vous contacterons pour vous indiquer votre degré de dépendance. En fonction de son résultat, un protocole de sevrage adapté peut vous être proposé.


Le test

Le matin, combien de temps après votre réveil, fumez-vous votre première cigarette ?

  • Dans les 5 minutes
  • De 6 à 30 minutes
  • De 31 à 60 minutes
  • Après 60 minutes

Trouvez vous difficile de vous abstenir de fumer dans les endroits où c’est interdit ?

  • Oui
  • Non

A quelle cigarette vous serait-il le plus difficile de renoncer ?

  • La première
  • Une autre

En moyenne, combien de cigarettes fumez-vous par jour ?

  • 10 ou moins
  • De 11 à 20
  • De 21 à 30
  • 31 ou plus

Fumez-vous à intervalles plus rapprochés en début de matinée que durant le reste de la journée ?

  • Oui
  • Non

Fumez-vous lorsque vous êtes malade et que vous devez rester au lit presque toute la journée ?

  • Oui
  • Non


Envoyez vos résultats à :
Gilbert LAZAR
www.stop-a-la-cigarette.fr

 

 
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